Des épisodes contrastés de pluie et de sécheresse ont limité le développement du colza et des protéagineux lors de la précédente campagne. Quel sera le cru 2021 ? S’il est encore tôt pour le dire, les premières observations de terrain laissent entrevoir une nette baisse des semis de colzas, en particulier dans l’Est.
Colza 2020 : des disparités régionales
Si la surface cultivée en France atteint 1,1 M ha comme l’an dernier, le régime hydrique de l’automne et de l’hiver 2019-2020 a, dans de nombreuses situations, altéré la qualité et le développement des enracinements, rendant la culture moins apte à surmonter les attaques continues des ravageurs ou les épisodes climatiques (sécheresse, gel,…) du printemps.
La récolte totale de colza, attendue à 3,3 Mt, s’explique par des situations régionales contrastées. Les surfaces étaient en baisse en 2019 en Bourgogne, Lorraine et Champagne-Ardenne. A cela se sont ajoutés des rendements globalement décevants. Faibles dans les bassins Centre et Centre-Est (25 q/ha en Bourgogne et 28 q/ha en Champagne-Ardenne), les résultats corrects ont été rares. La moyenne régionale de 30qx/ha n’a été atteinte (ou dépassée) que dans les Hauts-de France ou le Centre-Val de Loire. Mais les teneurs en huile sont meilleures que l’année dernière et devraient dépasser 44 % aux normes. Enfin, les prix du complexe colza se tiennent plutôt bien en raison de moindre disponibilités en graines de colza issues de la production européenne et d’une demande en huile et tourteaux qui reste ferme.
Protéagineux : hausse des surfaces, mais rendements moindres
Malgré des conditions d’implantation également difficiles en protéagineux, les surfaces affichent néanmoins une progression de 15 % par rapport à la moyenne quinquennale, soit près de 300 000 hectares. Les protéagineux ont en effet partiellement bénéficié du report des surfaces non semées en céréales.
Pourtant, les protéagineux et particulièrement les pois de printemps, ont fortement subi la sècheresse du printemps, qui a engendré des stress physiologiques à des moments clés du développement. La pression des ravageurs en 2020 a ensuite, globalement, réduit le potentiel de ces cultures, d’où une récolte décevante, à l’exception de certains secteurs (Hauts-de-France, Champagne). En aval, les débouchés en alimentation humaine, notamment ceux du pois en ingrédients, continuent leur progression : de nouvelles valorisations en alimentation animale de qualité semblent émerger, pour la féverole par exemple. Combinés à des besoins en tête de rotation dans de nombreuses zones, ces éléments devraient encourager les cultivateurs à maintenir, voire légèrement augmenter, leurs soles de protéagineux en vue des récoltes 2021.
Soja : maintien de la production
Pour la 8ème année consécutive, les surfaces de soja étaient en hausse en 2020 pour atteindre 186 000 hectares. Alors que les récoltes ne sont pas encore terminées, on sait déjà que les rendements seront très hétérogènes avec de piètres performances pour les sojas cultivés en sec. La production devrait cependant se maintenir aux environs des 430 000 tonnes. Quant au marché, il confirme le renforcement en faveur d’approvisionnement en soja non OGM d’origine française dans un contexte du prix du soja mondial plus élevé qu’à l’automne dernier.
Tournesol : une progression importante
La culture a profité des opportunités de semis au printemps, liées à la forte baisse de semis de céréales pour voir ses surfaces grimper de 30% à 775 000 ha. Globalement, le tournesol a encore une fois montré sa robustesse dans un contexte de stress hydrique estival sévère. Il semble en particulier s’en être bien tiré dans les régions plus septentrionales et de l’Est de la France où il pourrait conforter son retour pour diversifier des assolements où le colza peine actuellement à revenir. La forte proportion de tournesol oléique constatée pour les récoltes 2020 questionne cependant la filière française sur la manière d’équilibrer le mieux possible la production des deux types de tournesol importants pour le marché français de l’huile.
Campagne 2021 : des semis de colzas en baisse dans l’Est
Sous quels auspices se déroulera la campagne 2020-2021 pour les colzas ? S’il est encore trop tôt pour le déterminer, les premières observations de terrain de Terres Inovia, l’institut technique des huiles et des protéines végétales, donne les premières tendances dans les régions :
-A l’Ouest, les surfaces sont globalement stables, même si, localement, on note des variations de 5 à -10 % en Bretagne. En revanche, en Normandie, les surfaces des semis de colza ont, elles, progressé de +10 à +15%. Du côté des Pays de la Loire, la tendance est également à la stabilité (à l’exception de la Sarthe, en baisse). Dans le Poitou-Charentes, les surfaces sont pour le moment en hausse. Première région productrice de colzas, le Centre-Val de Loire affiche des surfaces stables, avec une légère augmentation des surfaces dans l’Est de la région alors que l’Eure-et-Loir et le Loir-et-Cher n’ont pas concrétisé toutes les intentions de semis en lien avec la sécheresse de l’été. « Les conseils de Terres Inovia d’anticiper les préparations de sol et d’être prêts à semer tôt ont bien été suivis par les agriculteurs des départements qui subissent, depuis quelques années, la sécheresse. Ils ont ainsi pu valoriser des passages de pluies très limités cette année », remarque Afsaneh Lellahi, directrice de l'action régionale et du transfert de Terres Inovia.
A l’Est, on note une diminution nette des surfaces semées en colza. Principale raison ? La sécheresse à nouveau, la pluie n’étant jamais arrivée à temps. Ainsi, en Lorraine, et probablement aussi en Champagne, les surfaces ont diminué de moitié. D’ores et déjà, dans l’Est, des remplacements de semis de colza par le tournesol, voire par le pois d’hiver, sont prévus. « La culture du tournesol présente des atouts agronomiques , bénéficie d’une bonne résistance au stress hydrique et elle est économiquement intéressante », rassure Afsaneh Lellahi.
Cumul de pluies du 01/08/2020 au 25/09/2020 - Phase levée (source : Terres Inovia)
Pluies par rapport à la normale (2000-2019) du 01/08/2020 au 25/09 en % (source : Terres Inovia)